Hot Girls Wanted: Turned On: l’envers du décor des films pornographiques

Absolument

Des décennies de tradition pornographique sont laissé une empreinte dans l’imaginaire collectif qui veut que le secteur soit étiquette de certains préjugés.

A l’heure du féminisme triomphant et de l’émancipation sexuelle, Hot Girls Wanted : Turned On se veut un film, pas forcément révolutionnaire, mais interpellateur sur des questions que l’on jugeait définitivement classées. Ce documentaire est la suite d’un autre sorti en 2015, Hot Girls Wanted, qui posait déjà le problème de l’éducation sexuelle avec acuité. Le doc-série de Jill Bauer et Ronna Gradus est une immersion dans l’univers de la pornographie pour en déconstruire les préjugés.

Hot Girls Wanted : La série Turned On est une production de six épisodes qui expose la problématique du sexe dans la pornographie sous un regard cru qui ne vise pas cependant, selon les réalisatrices, à rendre le sexe dégoutant. Leur but est de sensibiliser l’opinion mondiale sur la question taboue de pornographie et partant de la sexualité

Opposition pornographie classique contre pornographie amateur

Le premier épisode de la série se nomme « Women On Top » et a été réalisé par Rachida Jones. Dans cet épisode, la réalisatrice plante un décor contrastée entre la pornographie d’amateurs incarnée par Holly Randall et sa fille Suze et la pornographie professionnelle ou si l’on veut classique incarnée par Ericka Lust. Les premières tournent à Los Angeles aux Etats Unis et la deuxième à Barcelone en Espagne. La mère et la fille tourne avec les moyens de bord quand Ericka Lust possède un studio et des appareils derniers cris. Cette confrontation met en évidence un certain déclin de la pornographie classique à gros budgets qui datent des années 80 face à la pornographie récente faite dans des studios de fortune ou avec des webcams en live à partir de sa chambre. Aujourd’hui cette dernière a conquis des milliers de clients dans le monde entier car elle serait plus accessible et plus « naturelle ». Mais derrière cette apparente facilité se cache parfois des conditions de tournage précaires et improvisées proches de l’exploitation. La jeune fille serait davantage vue comme un objet de satisfaction. Elle devrait seulement obéir aux injonctions du scénariste même si elle a mal.

Lutter contre les préjugés sexistes et raciaux

Les réalisatrices de Hot Girls Wanted : Turned On que sont Jill Bauer et Ronna Gradus ont voulu par ce docu-série souligner des antagonismes durablement ancrés dans l’opinion du public.
D’abord elles voulaient souligner une différence de culture très nette entre les Américains et les Européens. Selon elles, à l’image du porno amateur caché dans des faubourgs loin des regards indiscrets et fustigeant, la pornographie aux Etats Unis serait un sujet tabou ou au mieux dérangeant. La société américaine est davantage tournée côté adrénaline pour ne pas dire violence, en témoigne les combats de WWE. Cette exposition de la violence permanente ne choquerait aucun américain alors que la nudité les dérangerait profondément. Par contre, en Europe, le sujet est plus ouvert à l’image des medias qui exposent la nudité de jour comme de nuit à travers des émissions ou des téléréalités. Même si des actrices comme Kim Kardashian exposent à tout vent leurs plastiques, l’Américain lambda serait plus réservé, plus pudique alors qu’il ne faudrait pas car la sexualité est avant tout une catharsis.
Ensuite la pornographie apparait davantage comme un acte de machisme à peine voilé selon les réalisatrices de Hot Girls Wanted : Turned On. Cet état des faits est dénoncé dans l’épisode « Money Shot » où des pratiques dégradantes du porno sont dénoncées dont la fellation pendant féminin du cunnilingus. Des sites comme « Facial Abuse » reposeraient leurs activités sur ce genre de pratique. Les actrices seraient souvent forcées de vomir pour satisfaire le spectateur-roi bien assis devant son écran. Aussi les jeunes filles, parfois très jeunes (18 ans) sont soumis à des rapports violents de la part d’hommes très forts sexuellement. L’on ne prendrait donc pas en compte la souffrance de celle-ci car davantage orientée satisfaction clientèle. Mais les femmes ne seraient pas les seules victimes de cette pornographie dite dégradante et stigmatisante.
De fait, les hommes aussi subiraient l’étiquetage à un certain niveau à l’image des acteurs noirs tel que le vétéran Tyler Knight. Celui-ci affirme que son identité est réduite à la taille de son membre comme les actrices de la webcam sont réduites à leurs numéros sur le net. Pour revenir à la pornographie raciste, certaines catégories d’hommes comme les « Black » seraient perçus comme des « bêtes de sexe » uniquement appréciés pour leurs performances sexuelles. Les réalisatrices dénoncent donc à travers ce documentaire glaçant les clichés traditionnels du milieu du sexe professionnel.

Rééducation sexuelle et invitation à un autre regard sur la pornographie

Hot Girls Wanted : Turned On s’inscrirait, non pas dans un sabotage de l’acte sexuel en soi, mais dans une prise de conscience de l’importance du sexe digne et du sexe tout court dans la vie des hommes. Aujourd’hui, elles préconisent un sexe plus soft, pourquoi pas entre femmes, pour adoucir la brutalité ancestrale du milieu très machistes. Mais ce qu’elles voudraient montrer à travers leur film ce sont les souffrances et les exploitations dégradantes que subiraient les femmes dans le domaine du sexe professionnel. En outre, conscient qu’aujourd’hui plus de 50% des adolescents acquièrent leur éducation sexuelle en visualisant les films porno, il serait plus qu’urgent de proposer un autre modèle de relation sexuelle loin de la brutalité constamment proposé qui pourrait rebuter ou provoquer une phobie chez le jeune spectateur. Cette sensibilisation devrait se percevoir sans honte comme réalisée sur les scandales agroalimentaires ou sur la pollution. Les auteures invitent à une prise de conscience collective sur la notion de sexe qui n’est pas que « masculin » ou « expéditif », mais serait tout un art. Enfin elles invitent à changer d’opinion sur les professionnels du sexe qui ne sont pas des filles faciles ou de mauvaise vie, mais bien des femmes de valeur qui mènent parfois une vie de famille.
Hot Girls Wanted : Turned On le docu-série de Jill Bauer et Ronna Gradus est une invitation à la prise de conscience sur la problématique du sexe dans le milieu de la pornographie. Mais plus encore elle vise à valoriser le féminisme dans ce milieu et à donner plus d’importance à la pornographie dans l’éducation sexuelle des adolescents et adolescentes sans préjugés. Elles viseraient maintenant à exposer, pourquoi pas, la pornographie VR, féministe voire gay. Un autre combat qui risque d’être plus ardu au regard des traditions sexuelles. Mais avec la montée en puissance des mouvements LGBT, peut être que faire accepter ces nouvelles formes de pornographie ne seraient pas aussi difficile que ça.

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